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Québec à la rescousse des maisons Gilles-Carle

La difficile conciliation entre travail et proche aidance

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Les personnes proches aidantes...
Photo: iStock Les personnes proches aidantes sont parfois contraintes de mettre un frein à leur carrière ou peinent à la concilier avec l’aide qu’il doivent apporter.

Parmi les proches aidants, 57 % occupent un emploi, selon l’Observatoire québécois de la proche aidance (OQPA). Pour ceux-ci, la conciliation entre travail rémunéré et responsabilités pose des défis majeurs. Cette double responsabilité, souvent invisible, peut engendrer une charge mentale importante, des conflits d’horaire et un épuisement progressif. Pourtant, des pistes de solution existent pour atténuer ces défis et mieux soutenir les personnes concernées.

« Les impacts sur la vie professionnelle pour les personnes proches aidantes, il va y en avoir à différents niveaux », explique Joanie Maclure, professeure au Département d’ergothérapie à l’Université du Québec à Trois-Rivières. Elle évoque notamment des réorientations professionnelles, des refus de promotions ou des changements d’emploi motivés par le besoin de mieux concilier les exigences de l’aidance et du travail. « On voit aussi des impacts à plus petite échelle, comme de l’absentéisme », ajoute-t-elle.

Certaines personnes réduisent leurs heures de travail ou passent à temps partiel. D’autres prennent une retraite anticipée ou, au contraire, la repoussent en raison des pertes financières liées à leur rôle d’aidant. « On va le voir aussi de façon positive, parfois après l’aidance, il y a une réorientation professionnelle pour réactualiser ses compétences de soutien », ajoute-t-elle.

«  On va le voir aussi de façon positive, parfois après l’aidance, il y a une réorientation professionnelle pour réactualiser ses compétences de soutien. »


Joanie Maclure

Les conséquences ne sont pas uniquement professionnelles. Joanie Maclure souligne les effets sur la santé psychologique : stress et épuisement sont le lot de beaucoup de proches aidants. Elle mentionne aussi des douleurs chroniques et un isolement social accru. Corinne Vachon-Croteau, directrice générale du Réseau pour un Québec Famille et de son initiative Concilivi, souligne aussi une imprévisibilité qui complique la planification, tant pour les proches aidants que pour leurs employeurs. « Ce n’est pas un parcours linéaire. La personne à aider peut avoir des besoins qui vont fluctuer dans le temps », souligne-t-elle.

Un autre obstacle majeur est le manque de reconnaissance du rôle de proche aidant. « Est-ce que je me reconnais dans le rôle de proche aidant ? » interroge Mme Vachon-Croteau. La peur de la stigmatisation freine aussi les déclarations aux employeurs. « Est-ce que je vais perdre des opportunités ? » ajoute-t-elle. D’autres préfèrent préserver leur vie privée ou craignent le jugement des collègues.

Des mesures à adapter et à formaliser

Les deux expertes s’accordent sur l’importance de mesures concrètes. Joanie Maclure insiste sur la flexibilité des horaires, la simplification des procédures et la formation des gestionnaires. Elle souligne aussi l’importance de l’autonomie décisionnelle : « Ce qui est atténuant, c’est tout ce qui donne du pouvoir d’agir, donc une certaine autonomie décisionnelle pour la personne proche aidante, par exemple sur le plan de la gestion de l’horaire. »

Elle cite également l’importance de canaux de communication efficaces entre l’employé et son gestionnaire, et la création d’espaces collectifs pour discuter de ces questions entre collègues. « On a vu des employeurs former du personnel pour être capables de remplacer au pied levé un travailleur qui aurait besoin de quitter rapidement son lieu de travail pour s’occuper d’un proche », illustre-t-elle.

Chez Concilivi, les mesures sont regroupées en quatre grandes catégories :

  1. L’aménagement du temps et du lieu de travail. « Le télétravail, des horaires flexibles, la réduc tion temporaire du temps de travail, un retour progressif après une longue absence, l’accès à un local pour des appels privés… » explique Mme Vachon-Croteau.
  2. Les congés pour responsabilités familiales, « comme fractionner les congés ou autoriser des congés de force majeure avec des banques de congés inclusives, notamment ».
  3. Le soutien aux employés grâce à des programmes et à des groupes d’entraide ainsi que la sensibilité des collè gues et des gestionnaires.
  4. L’adaptabilité organisationnelle avec des postes partagés et des plans de contingence.

Le Sceau Concilivi

Pour aller plus loin, le Sceau Concilivi propose une démarche structurée. « C’est une démarche accompagnée par des professionnels en gestion de ressources humaines », explique Corinne Vachon-Croteau. Les organisations sont invitées à sonder leurs employés, à formaliser les mesures dans une charte et à les communiquer clairement.

Cette charte vise à réduire le stress des employés et à offrir un cadre équitable aux gestionnaires. « Ça met des balises, ça dit aussi un peu à quoi moi j’ai droit comme employé », précise-t-elle. Le processus inclut une reconnaissance officielle et une amélioration continue. « Ce qu’on veut avec ce document-là, c’est d’abord formaliser les mesures, c’est-à-dire qu’elles soient claires, qu’elles soient écrites », souligne-t-elle.

Pour les proches aidants, cette charte — qui doit rester souple pour y inclure d’autres changements au besoin — peut être d’une grande aide. « Ils sentent qu’ils peuvent faire des demandes et aller voir leur gestionnaire », estime Mme Vachon-Croteau.

La conciliation entre emploi et proche aidance est un défi croissant, accentué par le vieillissement de la population et le maintien à domicile des personnes âgées. « Ça implique évidemment qu’il y a une communauté qui se mobilise pour maintenir ces gens-là à domicile », rappelle Joanie Maclure. Et pour que ce rôle ne soit plus source d’isolement, les organisations ont tout à gagner à reconnaître, soutenir et adapter leurs pratiques, conclut Corinne Vachon-Croteau.

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